La tournée de la députée Annie Le Houérou : Squiffiec

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Date de l'évènement: 
Vendredi, 29 Novembre, 2013

Squiffiec

Vendredi 29 novembre (2013) - Après Saint-Laurent (article ICI), Landébaëron (article ICI), Kermoroc'h (article ICI) et une pause déjeuner à Trégonneau, c'est à Squiffiec que la députée Annie le Houérou a été reçue par le maire Yvon Le Moigne. Cette halte ...

... prévoyait une rencontre avec Thierry Allain, aviculteur de la commune. "La double particularité de la commune, introduit le Maire, c'est que nous sommes dans les premières communes à avoir été remembrées en 1970, à une époque où le remembrement, c'était le "casse-talus" et des parcelles très grandes, ce qui facilite les choses aujourd'hui en terme de mécanisation, mais en terme d'écologie, c'est peut-être autre chose. L'autre particularité, liée à la première, c'est que nous disposons encore aujourd'hui de 16 exploitations sur la commune avec des exploitants de 43 ans de moyenne d'âge; Les successions ne sont donc pas à l'ordre du jour, fort heureusement. Parmi ces exploitations, il y un certain nombre d'exploitation spécialisées - polyculture, élevage lait - quatre exploitations avicoles aux données et aux approches différentes et une grosse exploitation porcine qui, à mon avis, est pionnière dans les contraintes qui s'imposent à l'agriculture aujourd'hui".

Directement impacté par la crise de Tilly-Sabco consécutive à l'arrêt des aides européennes versées dans le cadre de la PAC (Politique Agricole Commune) (NDLR : dites "restitutions", actées en 2005 et qui représentaient 55 millions d'euros par an pour la France), Thierry Allain expose ensuite son métier et ses préoccupations. Producteur de volailles depuis 1987, il élève 70.000 poulets dans les deux bâtiments qu'il possède sur Squiffiec. "On est une production intégrée. On me livre des poussins, on me fournit des aliments et je suis payé en fonction d'un indice de consommation et du poids moyen de mes poulets sortis. C'est vrai que quelque part, je suis le salarié d'un système tout en étant responsable de l'environnement de poulets qui ne m'appartiennent pas. Aujourd'hui, sur mes 2.400m2, il me manque 50.000€ de Chiffres d'Affaires et les emprunts et les charges sociales, eux, sont là et on ne sait pas ce qui se passe, on n'a pas d'échanges quant à la situation de crise actuelle".  Répondant à la question sous-jacente, la députée explique qu'elle n'a pas d'élément nouveau pour l'heure : "On doit aller lundi prochain chez Tilly-Sabco à Guerlesquin pour faire le point sur la façon dont allait se passer l'avenir puisqu'il y a pas mal de tractations en cours. On dit qu'il y a un certain nombre de choses qui vont perdurer, telle la filière qui va se maintenir; En tout cas tout est mis en œuvre pour que cela le soit, mais il faut qu'on reconstruise une filière qui offre des débouchés,. On importe beaucoup en France et nos producteurs ont un potentiel de production qui n'est pas utilisé".

 "Il y a quand même un paradoxe, intervient Pierre Lec'hvien, aviculteur sur Langoat et président de la coordination rurale des Côtes d'Armor, qui a accompagné Thierry Allain, c'est que la volaille consommée en France, c'est de l'import pour 46%, mais en RHD (NDLR : Restauration hors domicile) c'est 87%. À part KFC qui allait passer tout en français, les deux autres (NDLR : Mc Donald et Quick) sont 100% d'importation brésilienne ou thaïlandaise. D'un côté, on demande des subventions pour aller sur le grand export, et de l'autre, la volaille que nous consommons tous les jours est brésilienne. Elle est élevée aux farines animales, interdites en France, elle bénéficie de certains antibiotiques thérapeutiques, interdits ici, et ces entreprises n'ont pas les normes environnementales qu'on a ici. On ne peut pas être compétitifs comme cela". Pour Pierre Lec'hvien, l'autorisation faite à la France de débloquer 15 millions d'euros d'aides communautaires en 2014 en faveur de la filière avicole (NDLR : le 22 novembre dernier), "est "un effet d'annonce". Répondant à Annie Le Houérou qui précise "que ce sont quand même 15 millions qui ne seront pas sortis par la France", le président de la coordination rurale ajoute : "ils sont actés mais ce ne sera pas facile. Ils ne pourront pas être débloqués avant novembre décembre 2014. D'ici là, comment fait-on ? Le différentiel de prix entre un poulet français et un poulet brésilien est de 300€ la tonne. Les 15M€, représente 50€/tonne. Les 250€ qui restent, comment on va les trouver ?".

"Ca ne dépend pas que de la France, répond la députée, ça dépend de l'Europe, mais aussi des marchés internationaux. C'est un sujet hyper complexe, pour autant, tout le monde est autour de la table pour trouver une solution qui soit la plus équitable pour les uns et les autres". Elle rappelle qu'il y a les 15 Millions d'euros qui vont venir de l'Europe mais qu'il y aura aussi de l'argent mis sur la table par le gouvernement français pour régler les situations d'urgence. "Et urgence ne veut pas dire dans un an ou un an et demi" ajoute-elle. Elle indique par ailleurs qu'il y a le plan d'avenir qui est en construction et qui sera validé au Conseil Régional le 13 décembre et signé par le premier ministre. "Alors, vous dites effet d'annonce, argumente la députée Le Houérou, mais il y a quand même de l'argent sur la table, et tous les partenaires : représentants des salariés, des producteurs, des industriels, les élus se retrouvent pour construire quelque chose de durable". Elle rappelle que la situation actuelle était connue de tous, y compris des industriels, depuis 9 ans (2005) puisque la restitution était là pour que les entreprises s'adaptent à la réalité du marché. "Aujourd'hui, on vient chercher les pouvoirs publics, et c'est très bien, on est là pour écouter, entendre et essayer de porter les difficultés. Mais quelque part, certains n'ont peut-être pas fait ce qu'il fallait pour que la situation soit différente de celle qu'elle est aujourd'hui. On me dit que Tilly-Sabco a un peu investi : ils ont fait leurs saucisses de volaille, mais très peu par rapport aux masses qu'ils ont obtenues, et quelque part, les crédits européens et les restitutions leur ont permis d'investir au Brésil pour financer du poulet qui vient à prix encore plus bas inonder nos marchés et nous concurrencer. Il y a quelque chose dans le système qui ne fonctionne pas".

Après une dernière intervention de Pierre Lec'hvien qui parle d'un contrôle récent fait dans une entreprise sise sur la circonscription de la députée, contrôle ayant révélé que 90% du poulet trouvé dans les frigos était d'origine Brésilienne, hormis deux palox non identifiés, venant, soi-disant de chez "Boscher volailles" mais étiquetés en allemand, Annie Le Houérou conclut la réunion : "On n'est pas dans une économie encadrée. On ne peut pas dire un jour, quand ça marche, qu'on est libéral et quand cela vous affecte, qu'on a besoin de l'encadrement de l'administration. À un moment donné, il faut choisir. Je pense, d'une part, que l'Europe doit évoluer et je suis un peu optimiste au regard de ce qui se passe en Allemagne qui se rend compte qu'elle ne va pas pouvoir gagner seule en écrasant tous ses collègues européens et que l'Europe ne sera forte que si elle est unie et construite sur un système cohérent. Ce ne va pas se faire demain, les négociations sont âpres… mais je pense qu'il va y avoir un smic horaire en Allemagne et que cela va nous aider. D'autre part, concernant la question des normes, toutes ces contraintes qui vous sont imposées, qu'elles soient sociales ou environnementales… je suis d'accord pour dire que l'on ne peut pas s'imposer des normes si on ne les impose pas aux autres".

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