GP3A – Conseil d'Agglo (4/7) – Isolé, le CCE de Bégard va droit dans le mur, sauf si....

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Date de l'évènement: 
Mardi, 29 Mai, 2018

Mardi 29 mai (2018), lors du Conseil d'Agglomération de GP3A(1), il fut à nouveau question des services à domicile destinés à accompagner les personnes âgées dépendantes. Petit rappel : Au premier trimestre 2017, le Conseil Départemental, chef de file de l'action sociale, a publié un appel à candidature à l'attention des structures d'aide et d'accompagnement à domicile potentiellement ...

... capables de satisfaire le cahier des charges contraignant qui leur serait proposé en cas de candidature retenue. Le premier critère pour être retenu, c'était de justifier d'un quota d'heures de services rendus d'au moins 100.000 heures par an [NDLR : Voir L'avenir des services d'aide à domicile a fait débat]. Comme expliqué dans l'article lié ci-devant, aucune des structures du territoire ne satisfaisait ce critère et des regroupements ont alors été engagés. Seule structure publique – les autres sont associatives – le SECAD(2) de Belle-Isle-en-Terre s'est donc tournée vers le SAMAD(3) de Bourbriac, le Comité de Service à la Personne (CSP) de Guingamp, la structure ADSEVEL de Guingamp qui couvre le champ des personnes en situation de handicap et le Comité Cantonal d'entraide (CCE) de Bégard. Dans les mois qui suivirent, le sujet revint sur la table du Conseil d'Agglomération [NDLR : Voir GP3A répond à la consultation sur les services d'aide et d'accompagnement au domicile] : Pour le CCE de Bégard, la crainte de la perte d'une prime "d'usage", non inscrite dans les contrats de travail, avait mis le personnel dans la rue [NDLR : Voir Les personnels du CCE de Bégard grave mécontents !] et faute d'accord, le CCE s'est mis en marge de la fusion évoquée supra.

Aujourd'hui, et consécutivement à l'avis favorable obtenu de la part du Conseil Départemental [NDLR : Voir Services d'aide à la personne : les négociations sont ouvertes !], la 1ère Vice-Présidente de GP3A, Claudine Guillou, en charge de la Solidarité Sociale et Territoriale, présente les conditions et les modalités selon lesquelles le SECAD, structure publique, va se fondre dans la nouvelle association de droit privé, ASAD-Argoat, laquelle est constituée, depuis le 1er janvier 2018, des structures associatives de Bourbriac et de Guingamp et donc de Belle-Isle-En-Terre... en attendant le CCE de Bégard qui a bénéficié d'un délai de réflexion, ou plutôt de réalisation, de la part du Département.

Transfert du SECAD de Belle-Isle-En-Terre

"Il en allait de la survie du service, déclare la vice-présidente en évoquant le SECAD ; Ne pas s'engager dans un projet de regroupement ne nous permettait plus de garantir les financements du Département et la préservation de l'autorisation d'exercer". Il fallut donc discuter, se réunir, négocier, accompagner, expliquer... "Nous avons eu nombre de réunions ; Nous avons effectué un gros travail d'accompagnement avec les personnels ; Cela n'a pas été évident car nous avions au SECAD une partie des agents en titulaires – 20 fonctionnaires territoriaux -  et 13 autres en CDI de droit public". Ce fut donc des entretiens individuels, des rencontres avec les organisations syndicales, des réunions du Comité Technique... "Ce transfert s'est fait en étroite collaboration avec le personnel pris individuellement et les organisations syndicales" résume Claudine Guillou pour ce qui est de la forme. Il en ressort les points suivants qu'elle expose : "Pour les agents titulaires, on leur propose un détachement ; Ils restent agents de GP3A, conservent leurs droits à l'avancement et à la retraite et seront liés à la nouvelle association ASAD-Argoat par un contrat CDI de droit privé". Le détachement ne peut se faire qu'à la demande de l'agent ; Il se fait pour une durée de 5 ans, renouvelable autant de fois que souhaité par l'agent. Par ailleurs, GP3A est dans l'obligation de conserver les clauses substantielles de leurs contrats : rémunération, secteur géographique, qualification et durée hebdomadaire de service. "Pour les agents en CDI de droit public, poursuit l'élue, ils vont être transférés à leur demande et seront liés à l'association par un contrat associatif de droit privé".

Toutes ces démarches ont été accompagnées par un cabinet juridique et le transfert se concrétise sous la forme d'une convention qui précise les conditions de transfert des actifs matériels, des finances, des personnels, les modalités de mise à disposition des locaux - et notamment la redevance fixée pour 2018 à 81€/m2 au titre du loyer et des charges – et les autorisations d'exercer. Une autre convention de subventionnement va lier GP3A à l'ASAD-Argoat ; Cette subvention, révisée chaque année, sera versée tous les ans pendant la durée de 5 ans. Elle est renouvelable si les objectifs définis sont respectés, notamment en matière de maintien de l'activité. "Pourquoi cette convention ? interroge Claudine Guillou ; Parce qu'il y a des écarts de salaires entre les agents que nous transférons et les agents des autres associations fusionnées. Ecarts favorables aux agents du public compte tenu d'un régime indemnitaire qui crée un écart, malgré des salaires de base inférieurs de la convention collective de l'aide à domicile".

Yvon le Moigne tient à apporter une précision sur la forme : "Lors du Comité Technique, si le collège des élus s'est prononcé favorablement, le collège des représentants des personnels s'est abstenu". Selon lui, la raison de cette abstention ne résidait pas dans ce qui était proposé. "La raison qui m'a été donnée, poursuit Yvon Le Moigne, c'est que tout ce qui était proposé aux agents correspondait aux attentes – c'est dire combien le travail en amont a été important et négocié – mais qu'il s'agissait d'une posture de principe ; Il ne pouvait pas valider le transfert d'un service public vers un service privé"

Cela dit, Emmanuel Lutton tient à signaler que deux cas ne sont pas résolus. Il s'interroge sur la subvention de GP3A : "Pourquoi on ne prend pas la compétence ? Pourquoi LTC(4) y réfléchit, Saint-Brieuc l'a fait, LAC(5) l'a fait, pourquoi Dinan est en train d'y réfléchir ? On va être les seuls dans ce système-là". Claudine Guillou lui répond : "Il y avait effectivement d'autres solutions mais lorsque le SECAD s'est engagé dans ce projet, les associations avaient déjà commencé le travail de rapprochement. De plus, les associations souhaitaient conserver le statut associatif". Il est vrai qu'Emmanuel Lutton avait proposé une collaboration mixte [NDLR : Voir L'avenir des services d'aide à domicile a fait débat)  et il insiste : "L'agglo aurait pu prendre la compétence, passer des accords avec les associations. C'était tout à fait faisable... le Département l'avait même entendu et était prêt à suivre dans ce sens-là... Entre temps, il y a eu la fusion et c'est tombé à l'eau".

Pour Virginie Doyen, ce serait bien de réfléchir sur la nature du service rendu, sur la politique de l'accompagnement : "Je ne suis pas contre tout dans ce projet mais il faut sécuriser ce service. C'est un service important sur le territoire et il y a une réelle réflexion à avoir. Il faut vraiment reconnaitre ce métier et le valoriser et ne pas le prendre à la légère".

"Nous avons été très attentifs pour garantir tous les acquis des personnels, intervient une nouvelle fois la rapporteuse du projet ; Les rémunérations ont été conservées, nous garantissons les écarts de salaires, les primes de départ à la retraite, nous avons repris l'ancienneté des agents à leur rentrée dans la structure (en 2004), nous garantissons le supplément familial... Tout est garanti ! Cela a été notre souci constant et je ne vois pas comment on pouvait faire mieux ! Il ne faut pas être apeuré par ce transfert... Il va se passer au mieux".

Sans fusion, le CCE de Bégard "va droit dans le mur"

Fidèle à ses déclarations de ces derniers mois, Cinderella Bernard, la Conseillère Départementale, 1ère adjointe de Bégard, regrette de voir un service public se retirer au profit d'une association mais reconnait que cela a été un "résultat démocratique". "Dans ces structures associatives, ce ne sont plus les élus qui sont en majorité mais des représentants des personnels, des usagers, et je trouve que c'est dommageable. On perd le pouvoir sur les décisions qui sont prises dans cette structure" puis d'enchainer sur la situation Bégarroise : "Pour ce qui est du CCE de Bégard, il y avait une crainte, qu'on n'a pas su apaiser, des personnels par rapport à leurs conditions salariales dont 1% du plafond de leur salaire qui pouvait être dénoncé au bout de 6 mois après l'absorption dans cette nouvelle structure. Ç'était un élément bloquant car ce sont des salariés avec des contrats très précaires et des conditions de travail très difficiles, de plus en plus difficiles... Face à nous, on a des personnels en grande souffrance parce que le métier est difficile, mal payé, les frais de déplacement pas tous couverts...". Pour elle, c'est bien sûr un combat national et un élément à prendre en charge plus particulièrement au niveau du territoire, d'autant plus que le Département a voulu aller plus vite : "La loi oblige la fusion des structures à partir de la fin de la convention en cours, mais le Département a précipité les choses pour que ce soit effectif dès la rentrée 2018 et 2019 pour les plus en retard". Elle confirme que le CCE n'a pas fusionné ; "Nous avons rencontré le Département qui nous répond qu'en raison des contraintes financières imposées par l'Etat et qui limitent le niveau de dépense de la collectivité, il envisageait de faire des économies sur l'accompagnement des personnes dépendantes. Pour les structures qui n'auront pas fusionné, comme la nôtre actuellement, il y aura une baisse de nos tarifs qui nous emmène droit dans le mur... Donc on n'a pas le choix. On a réussi a négocier seulement un an sous réserve que l'on donne des preuves que nous travaillons à une fusion". Et fusion il devra y avoir et le CCE s'y prépare : "La démarche faite a été d'intégrer aux contrats des personnels le 1% pour lever cet élément de blocage. On est dans une situation très complexe et il est difficile de trouver une solution satisfaisante pour tout le monde". Elle salue le travail fait et exposé par le rapport et qui va dans le bon sens pour les salariés qui vont intégrer cette structure nouvelle. "Le SECAD ne peut pas rester seul, conclut-elle ; Quant au choix politique, je rejoins Emmanuel Lutton". Le CCE de Bégard devra sans doute faire le même choix dans les quelques mois à venir.

La solution associative est une solution remarquable

Lise Bouillot se veut rassurante "Malgré la position de posture prise par les syndicats, il n'y a pas d'inquiétude à avoir". Elle souligne le travail des agents, des syndicats et des élus. Si elle trouve que cela n'a pas été une sinécure, elle juge que "le résultat est satisfaisant".

Pour compléter l'information sur le sujet, Claudine Guillou insiste sur le fait que l'agglomération a tenu à garantir tous les acquis des agents du SECAD : "Ils vont bénéficier au sein de l'ASAD d'une rémunération de leurs déplacements supérieure à celle dont ils bénéficiaient au SECAD ; Les primes versées pour les jours fériés travaillés sont supérieures à l'ASAD ; Ils vont bénéficier d'une mutuelle d'entreprise prise à charge à 50% par l'association ; Ils vont bénéficier d'un contrat de prévoyance assumé aux deux tiers par l'association" et de conclure : "Ce sont des avantages conséquents pour nos agents en sus des garanties de préservation des acquis. Longue vie à l'ASAD Argoat et étant représentée au sein du Conseil d'Administration, l'Agglomération restera très attentive à l'évolution de cette structure".

Avant de faire voter la délibération, le Président, Vincent Le Meaux, souligne le travail considérable qui a été fait en discussions, en négociations... "Même s'il aurait été possible de faire autrement, il faut considérer la situation de notre territoire : une association s'est constituée du côté de Callac et Maël-Carhaix et une autre est en cours d'élaboration pour Pontrieux, Paimpol et Plouha. En tout état de cause, la solution associative est aussi une solution remarquable. Dans les années 70, dans les Côtes d'Armor, ce sont les associations qui ont permis la mise en œuvre d'une mission de service public indispensable en la matière". Pour lui, s'il est légitime de de se poser la question, entre public et privé, de qui est le mieux placé pour assumer cette mission, en l'occurrence, il juge qu'il n'est pas possible de mettre en accusation le secteur associatif pour assumer une telle mission de service public. "Mais dans le cadre du projet de territoire, nous pouvons nous interroger sur les missions d'actions sociales que nous devrons porter dans le cadre des compétences de l'Agglo, sur la valeur ajoutée que l'agglo peut apporter dans l'accompagnement de la personne âgée. Ce travail devra être fait". Pour le Président de GP3A, la solution trouvée est une bonne solution : "Le caractère associatif permet aux communes de rester actrices de l'accompagnement des personnes âgées. Elles sont parties prenantes car elles sont membres de droit au Conseil d'Administration, alors que si l'Agglo prenait la compétence, les communes ne seraient plus concernées sur l'action sociale de l'accompagnement". Il clôt le sujet en déclarant d'une part qu'il sera "très attentif à la situation de Bégard afin qu'aucune personne âgée du territoire ne puisse souffrir d'un manque de services" et en rassurant sur sa perception de ce métier difficile : "Je sais ce que c'est le revenu d'une personne qui travaille auprès des personnes âgées dépendantes et des conditions de travail : ma maman a été auxiliaire de vie sociale pendant 20 ans".

[vote] L'absorption du SECAD par l'association Asad-Argoat dans les termes et les conditions exposés est votée à la majorité des conseillers présents et représentés. Se sont abstenus Dominique Cœur (de Ploubazlanec), Virginie Doyen, Yannick Echevest, Jean Coëdic (Bégard), Hervé Le Gall, Annie Le Gall, Marie-Yannick Prigent, Cyril Jobic et Monique le Masson

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Notes : (1) GP3A : Guingamp Paimpol Armor Argoat Agglomération – (2) SECAD : SErvice Communautaire d'Accompagnement à Domicile - (3) SAMAD : Service d'Aide au Maintien à Domicile – (4) LTC : Lannion Trégor Communauté - (5) LAC :Leff Armor Communauté

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