Coopération Intercommunale - Comprendre les enjeux

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Date de l'évènement: 
Mercredi, 21 Novembre, 2012

"C'est le bazar", "c'est l'anarchie totale", "on ne comprend plus"… voilà, entre autres, les sentiments captés par les élus locaux en provenance des habitants des communes concernées, au vu la médiatisation faite autour du projet de fusion territoriale ...

...de Pays de Bégard et de Centre Trégor (surtout!). Conscients de la confusion que laisse ce sujet dans l'esprit de chacun, les élus des communes de Centre Trégor et de Pays de Bégard, favorables à la poursuite d'un travail visant la fusion des 2 EPCI au détriment d'une fusion avec LTA (pour Centre Trégor) et avec Guingamp (pour Pays de Bégard) se sont réunis le 21 novembre pour apporter des éclaircissements sur la situation actuelle. "Pour le citoyen, il est plus facile de comprendre que nos désaccords sont des conflits de personnes" fait remarquer Didier Neveu, 1er adjoint de Cavan alors que l'origine profonde du problème, tel qu'exposé par les différents intervenants, repose sur la volonté des communes réunies de mettre en place de façon pérenne une structure à dimension humaine, gérée par les communes, mise au service des communes, forte de ses valeurs rurales, constituant un trait d'union entre les agglomérations de Lannion et de Guingamp, plutôt que d'être des apporteurs de population pour ces mêmes communautés d'agglomération qui espèrent sur les renforts respectifs des 9.239 et 6.314 habitants des actuelles EPCI Pays de Bégard et Centre Trégor pour appuyer l'obtention de financement de projets qui risquent d'aller vers les agglomérations au détriment des communes rurales. "Ce qu'ils veulent, c'est que l'on fasse la masse, que notre population augmente les chiffres afin qu'ils aient les oreilles des bailleurs de fonds  européens" dira Philippe Weisse, le maire de Quemperven, en poursuivant : "et quand on voit ce projet de Zénith de Lannion qui tombe du ciel et dont le ticket d'entrée est au bas mot de 10M€, on est en droit de se poser des questions". Vincent Clec'h complète : "Coté gouvernance de ces grosses EPCI, chaque commune aurait 1 délégué parmi 60 ou 80. Que voulez-vous que l'on puisse faire remonter. Déjà, c'est difficile lorsque l'on est 20 ou 30".

Mais plus que le fond, c'est surtout la forme qui pose problème. "On nous demande de dire oui à quelque chose que nous n'avons même pas discuté. On ne peut pas s'associer comme cela sans savoir ce que l'on va mettre dans la corbeille" expose Jean Ribaut, le président de Pays de Bégard. Incontestablement, la situation délétère actuelle est le fruit pourri d'une démarche orchestrée par l'état qui aimerait que les périmètres qui ont été fixés, sans concertation, soient acceptés sans autre forme de préalable et sans autre précision sur les conséquences de ces fusions pour les "petites communes agglomérées" (Germain Sol Dourdin, maire de Coatascorn); Et pour tenter ce coup d'état, la pression est mise à coup de délais incontournables ou de modalités impossibles à satisfaire du fait, notamment, de la position de certains élus locaux qui se sont laissé emporter, sans plus d'information, par des perspectives de fonds supplémentaires ou de préservations de compétences qui n'ont, les uns comme les autres, de moins en moins de consistance eut égard à la loi de finance 2013 et à la limitation à deux ans maximum du partage des compétences.

"Il est devenu indispensable de faire comprendre les enjeux à nos populations et de mettre en exergue la solidarité des maires qui s'opposent à un schéma qui nous est imposé alors que la Constitution fixe le principe de la libre administration des collectivités. Ce principe est ici bafoué […] majoritairement, sur les deux territoires, on s'oppose aux fusions qui nous sont imposées. La réforme telle que conduite par le Préfet est détestable sur le fond et la forme. Elle oppose les gens alors que l'on est habitué à travailler ensemble" explique Vincent Clec'h, 1er adjoint de Bégard et référent de Pays de Bégard pour le projet de fusion. "Entre Pays de Bégard et Centre Trégor, nous avons une tradition de travail en commun depuis de longues années: traitement des déchets, petite enfance, école de musique… On a déjà eu des idées de mutualisation sans que l'on vienne nous les imposer. Les élus ne sont pas que sots! Ils n'ont pas besoin d'être menés à la baguette. Dans cette 'sacrée' réforme, les citoyens ont été oubliés; Nous on veut revenir à nos fondamentaux : travailler auprès des gens, leur apporter ce qu'ils sont en droit d'entendre. Sur 186 élus, 107 sont favorables à notre projet de fusion. On n'est pas contre une réforme, mais il ne faut pas faire n'importe quoi. Dans la loi, il est dit qu'il y a fusion obligatoire des communautés de moins de 5000 habitants. On n'est même pas concernés par ces excès de zèle obsessionnels, sachant qu'ailleurs dans le département, ce n'est pas pareil. Ici, il y a des barons qui font miroiter que l'on aura plus d'argent. C'est totalement faux. Ils vont perdre leur triple A" surenchérit Gérard Le Caër, le Maire de Bégard.

Jean-Claude Jégou, maire de Pluzunet et référent de Centre Trégor dans le projet de fusion livre sa position : "Pourquoi Joël Le Jeune, Maurice Offret ou Gildas Le Troadec dirigent-ils les débats (ndr : ce sont respectivement les présidents de LTA, du Centre Trégor et de Beg ar C'hra) alors que cela regarde les communes?  En 2013, il faut reprendre le débat dans le bon sens, sous la direction directe du Préfet et du Sous-préfet qui doivent expliquer les enjeux, les modalités et les conséquences de cette réforme pour nos communes. L'idéal serait d'inscrire ce projet dans les programmes des municipales 2014 fin que la démocratie parle enfin et soit respectée".

D'ici là, des actions ont été engagées et vont l'être prochainement. Ainsi, Vincent Clec'h signale que Christian Marquet, Conseiller Régional, a exposé la situation à la ministre  Marylise Lebranchu avec laquelle il a eu un entretien. "C'est une démarche importante car les préfets sont le bras armé de l'état mais les ministres peuvent agir sur les décisions préfectorales" explique-t-il. Enfin, le 20 décembre, la CDCI présidée par le Préfet se réunit. Gérard Le Caër qui y est convié. Il demandera un moratoire "afin que les choses se discutent et qu'il n'y ait pas de décision prise à la hussarde" précise-t-il en poursuivant : "D'ici là, on va porter le dossier à tous les membres du CDCI avec les délibérations de toutes les communes, on va s'inviter à discuter avec les maires et les communautés de Guingamp, de Pontrieux, de Belle-ile-en-terre, de Bourbriac, bref tous ceux qui sont concernés et après, on seraient capables d'avoir d'autres réactions si jamais la démocratie n'est pas respectée". Sans plus préciser le maire de Bégard conclura avec optimisme : "Le bon sens s'étant exprimé, je pense que le Préfet ne peut pas outrepasser le fait que nous avons délibéré, que l'unanimité se dégage pour un projet alternatif, sinon ce serait un déni de démocratie. Mais je crois que le Préfet sera favorable et ce sera le triomphe de la démocratie pour l'aménagement du territoire que nous souhaitons".

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