Réforme territoriale : pour le maire de Bégard, " c'est pire que de l'amateurisme!"

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Date de l'évènement: 
Vendredi, 13 Juin, 2014

Le vendredi 13 juin dernier (2014), le sénateur communiste Gérard Le Cam est intervenu à Bégard en qualité de président de l'ADECR 22 (Association Départementale des Élus Communistes et Républicains des Côtes d'Armor) pour apporter ...

... quelques éclaircissements concernant les modifications apportées aux modalités électorales des Sénatoriales prochaines et notamment sur l'introduction de la proportionnelle et surtout, pour exposer le projet de loi se rapportant à la nouvelle organisation territoriale de la République. A la quarantaine d'élus départementaux de même sensibilité politique présents à ce rendez-vous, il rappelle en exergue que ce projet de loi est fondé sur trois axes principaux : des régions plus puissantes et regroupées pour favoriser la promotion du développement économique, l'emploi et la cohésion territoriale, la montée en puissance des intercommunalités pour une articulation qui fasse que l'armature territoriale repose sur le couple intercommunalités/régions, et la redéfinition des rôles des conseillers généraux dans la perspective de leur disparition.

C'est en tout cas ce que projette la loi car le moins que l'on puisse dire, ce soir-là, salle Jean Moulin, c'est que s'il y avait un consensus, ce n'était autour des objectifs énoncés par le gouvernement et rapportés en l'état par le sénateur Le Cam. Ainsi, dans sa présentation, ce dernier expose par la suite que "la réforme des collectivités territoriales est une révolution dans l'organisation des structures du territoire faite au nom d'économies présentées comme inévitables". Il précise que "cette réforme est contraire à l'engagement 54 du président Hollande qui visait à associer les élus locaux afin de promouvoir une nouvelle étape de la décentralisation". Pour lui, cette réforme va conduire à la disparition des communes au profit d'intercommunalités d'au moins 20.000 habitants "et à la fin programmée des départements, même si cela est contraire à la Constitution". Toujours selon le sénateur, elle va (la réforme) conduire au regroupement des régions et à la réduction des élus locaux, "tout cela s'accompagnant d'une cure d'austérité sans précédent pour toutes les collectivités".

L'ADECR, par la voix de son président Costarmoricain, demande la convocation de nouveaux États Généraux de la Démocratie Territoriale par le sénat. Elle demande par ailleurs qu'au terme d'un large débat, un référendum puisse permettre l'expression démocratique du "peuple souverain".

Pour Jean-Guy Le Bère, ancien élu Briochin, "la décision a été prise à l'Élysée au coin d'une table, entre le Président et Manuel Valls, et les choses vont au pas de course". Pour lui, "pendant ce temps-là, ceux qui devraient être impliqués dans l'organisation de la France, dans son fonctionnement, c’est-à-dire les citoyens, ne vont rien voir si les choses restent comme cela. Quand on va commencer à toucher un tant soit peu aux communes, cela va peut-être commencer à bouger, mais il ne s'agit pas que des communes".

Après qu'un intervenant explique que la structure territoriale dite "Pays" n'a pas vraiment pris en dehors de la Bretagne : "le Pays est une notion bretonne initialement prévue pour venir remplacer les collectivités de base; Mais finalement, le Pays n'est pas devenu une collectivité, car on s'y est opposé. C'est devenu un territoire de réflexion, de coordination, de programmation, mais un Pays ne réalise pas; Il n'a pas les budgets. On réalise dans le Pays, mais ce n'est pas le Pays qui réalise"… Gérard Le Caër intervient pour expliquer qu'à Guingamp, la frontière a été franchie : "le Pays de Guingamp, sous l'ère de Jean David, est devenu un Pays décideur, doté d'un budget. C'est une sacrée machine et nous avons été les seuls, à la communauté de communes du Pays de Bégard, à nous opposer à cela. Pour nous, un Pays est une boîte à idées, une boîte à réfléchir mais pas une boîte à faire". Puis rebondissant sur le sujet de la réforme territoriale, il se dit interpellé par le fond et la forme de celle-ci : "Sur le fond, allons-nous donner à nos concitoyens les moyens de leur épanouissement, ce qui est le sens même de notre mission d'élus ? Allons-nous, en les éloignant des décisions, les amener à prendre conscience des faits politiques marquants et des décisions qui sont bonnes pour eux tous les jours ? Allons-nous réaliser des économies ? J'aimerais d'ailleurs que sur ce point-là, il y ait un audit financier qui dise que faire de ces grands bazars là, c'est générateur d'économies ou du moins d'équilibres …". Il se rappelle avoir lu dans un ouvrage de (ou sur) François Mitterrand : "le socialisme, c'est la ville" (NDLR - Sources du Web : c'est effectivement rapporté par Jacques Attali dans "Chronique des années 1981-1986" à la date du 19 janvier 1982 et par Jean Rouaud dans son livre "Les villes fantômes") et "quelque part", dit-il, "si l'on regarde tous les spectres, qu'il s'agisse de la réforme des rythmes scolaires ou de la réforme territoriale, tout cela va dans le même entonnoir, dans le même sens : vider les territoires ruraux de leur substantifique moelle". Pour lui, "tout cela est orchestré, on part vers un peu de fédéralisme et je crains que la vie ne se simplifie pas pour le citoyen. Il ne va pas savoir se retrouver, se repérer et retrouver des choses simples comme le respect, la morale et cela m'inquiète, notamment en terme d'éducation". À propos de la disparition annoncée des conseillers généraux, en qualité de Conseiller Général en charge de l'éducation et des collèges, et maire, il avoue que "cela est relativement douloureux; On nous fait creuser notre propre tombe". "Au premier septembre 2017, continue-t-il, on va poser les clés des collèges à la Région et alors, je ne sais d'où, on viendra s'occuper de collèges, je ne sais où... et de transport scolaire. Et qui viendra gérer la mise en place d'un abribus à Coatascorn ?". "Tout cela va nous affaiblir et diminuer les valeurs qui sont les nôtres, résume-t-il; Je suis très inquiet et on le vit très mal au Conseil Général, y compris chez mes collègues socialistes".

Après le fond, la forme … "Sur la forme, dit Gérard Le Caër, la façon de faire des gouvernants actuels est historiquement inédite. C'est de l'ilotisme politique. Ils travaillent à deux, il n'y a pas de discussion, on ne sollicite pas la base et on nous fait croire, de façon assez primaire, que lorsque les élus auront disparu, on va faire des économies. C'est du populisme". Un autre participant dira : "c'est une politique de copains".  Le maire de Bégard et conseiller général rappelle qu'un Conseil Général, "c'est 600 millions d'euros de budget, 100 millions d'investissement tous les jours pour les enfants, les routes et le social, pour empêcher les gens de crever de faim sur le Département". Sur la forme, "c'est pire que de l'amateurisme !" clame-t-il, avant de prendre un exemple : "Ici, on estime qu'entre Guingamp et Lannion, il y a un territoire qui pèse 16.000 habitants, qui est très bien structuré. On va chez le Préfet l'autre jour qui nous annonce que ce n'est plus 5.000 mais 10.000 habitants maintenant le plancher fixé pour la constitution des territoires. On est bon je me dis mais voilà que le conseiller du Préfet intervient en lui disant qu'il vient de recevoir un coup de fil et que ce n'est plus 10.000, c'est 30.000! Après, on me dit que cela va peut-être passer à 20.000"…

"Il est grand temps d'attirer l'attention du peuple" conclut-il avant de laisser la parole à d'autres débateurs…

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